Shawinigan, la « cité électrique » du Canada
08/07/2018Vendredi 8 juin 2018
« En général c'est surtout les européens qui prennent le train », lance joyeusement Josée-Anne alors que l'on monte à bord de sa voiture.
« Ça ne m'a pas surprise quand tu m’as dit qu’il était en retard. Il est toujours en retard. »
Lorsqu'elle a réalisé que nous venions en train, notre hôte AirBnB a gentiment proposé de venir nous récupérer à la gare, non sans exprimer une certaine surprise. Car, semble-t-il, il ne viendrait pas à l'idée d'un local de faire une chose pareille : relativement cher, avec un réseau peu développé qui donne la priorité au fret, ce qui occasionne de nombreux retards, le transport ferroviaire canadien n'a en effet pas très bonne réputation.
«Shawinigan, c'est la petite New York ! » s'exclame encore notre hôte au milieu de son énumération des curiosités locales, tout en navigant les rues en échiquier du centre-ville.
Entièrement aménagée sur plan à partir de 1898, la ville a effectivement été bâtie sur un modèle similaire à la grosse pomme, avec des artères numérotées, une avenue Broadway et même un projet de parc public commandé à la firme ayant dessiné Central Park (projet qui fut finalement abandonné).
Ces plans de construction ont en grande partie été financés par la Shawinigan Water and Power Company, une entreprise du secteur énergétique qui, attirée par le potentiel hydro-électrique de la rivière Saint-Maurice, acquit à la fin du XIXe un vaste territoire autour de celle-ci, avec l'ambition d'en développer les environs.
Nous déposons nos affaires à l'appartement puis nous partons explorer le centre-ville, grosso modo composé d'une dizaine de rues (autant dire que la comparaison avec New York s'arrête là).
On déjeune tranquillement en terrasse sur la 5e avant d'aller se prélasser au parc Saint-Maurice, longeant la rivière du même nom.
Ayant prévu de passer la journée du lendemain au parc de l'Île Melville, on entreprend de faire un tour au Marché Public pour acheter de quoi se constituer un pique-nique avec de bons produits du terroir, en circuit court, comme de bons citoyens éco-responsables.
On ne fait pas deux mètres dans le marché qu'on se retrouve avec une tranche de canard fumé entre les doigts, et dix minutes plus tard on sait tout ou presque de la vie du boucher et de ses enfants.
Les commerçants sont extrêmement sympathiques et la plupart nous tendent des échantillons sans vraiment essayer de nous vendre quoi que ce soit (« C'est juste pour le plaisir ! »).
On repart avec des olives, des rillettes, des tomates, des radis et du bon fromage qui débouche les narines.
On repasse à l'appartement poser le tout avant de faire un saut à l'Uni-Vert des Artisans qui, au-delà d'offrir une certaine concurrence aux salons de coiffure, propose des produits de l'artisanat local (on repartira heureux propriétaires d'une bougie senteur concombre du jardin).
On passe ensuite la soirée au Trou du Diable, une brasserie-restaurant locale qui produit de la bière exportée à l'internationale, avant d'assister à un coucher de soleil des plus dramatiques.
Samedi 9 juin 2018
Le parc de l'Île Melville s'étend en grande partie sur Shawinigan-Sud, de l'autre côté de la rivière Saint-Maurice. On traverse cette dernière par l'Île Melville et sa Cité de l'Énergie, et en longeant le Barrage Melville.
On décide de faire un crochet par la zone urbaine de Shawinigan-Sud, en suivant la rivière puis en remontant jusqu'à l'église Notre-Dame-de-la-Présentation (j'ai longuement cherché une vanne, je n'ai rien trouvé qui ne dépasse le niveau dad joke, je m'abstiens donc), et en poursuivant jusqu'à la 105e où nous avons appris la veille qu'il s'y déroulait la grande foire annuelle (heureux hasard du calendrier).
Il semble que l'intégralité de la population shawiniganaise et des alentours s'y soit donnée rendez-vous, affairée à chiner des chandeliers en laiton et des boules à neige, entre deux churros au sirop d'érable (je m'y procure dix paires de socquettes pour 5$, une nouvelle fois soucieux de faire tourner l'économie locale).
On troque ensuite les baraques à frites et les vendeurs de tongs pour la nature verdoyante et les chutes du parc de l'Île Melville, à l'ouest de Shawinigan-Sud.
Le parc dispose de plusieurs sentiers plus ou moins balisés, aux distances variées, certains faisant office de piste de ski de fond ou de raquettes l'hiver venu (et ici, ça prend pas sept saisons).
Il semble malheureusement que l'on arrive après la crue printanière des eaux de la rivière Saint-Maurice, le débit s'en retrouvant fortement réduit.
Le panorama offert par le belvédère demeure tout à fait charmant, et l'on s'y attarde quelques instants.
On traverse ensuite le parc jusqu'à son extrémité sud, débouchant sur le lycée Val-Maurice et sa piste de ski.
On décide de retourner au belvédère des chutes pour pique-niquer, avant de retraverser la rivière Saint-Maurice dans l'autre sens pour gagner Shawinigan-centre et se caler à proximité de la place des canotiers pour le reste de l'après-midi.
À l'heure de l'apéro, on se met en chemin pour le Broadway Pub, une autre micro-brasserie repérée la veille et qui se situe de l'autre côté de la ville, à deux pas du parc Saint-Maurice. On constate avec une grande tristesse (et je plaisante à peine) que l'on a manqué PoRn, un groupe autoproclamé « Montreal's KoRn tribute » qui s'y produisait la veille.
Pour se consoler, on commande des IPAs avec des nachos.
On retourne ensuite au centre-ville pour diner et y passer le reste de la soirée.
Dimanche 10 juin 2018
On entame la journée par un footing du côté de Shawinigan-Sud, avant de saboter tous nos efforts en se faisant un maxi brunch chez Bianky.
Comme nous ne repartons qu'en fin de journée, nous retournons nous poser au parc Saint-Maurice, où j'en profite pour compléter la troisième semaine du MOOC Learning How To Learn (que je recommande chaudement au passage).
On reçoit une notification annonçant 1h30 de retard pour notre train (tiens donc !), tout en recommandant de venir à l'heure quand même, au cas où. Ce qui est un peu plate, la gare de Shawinigan offrant une gamme de divertissements pour le moins limitée.
En définitive, le train aura 2h30 de retard, entrant finalement en gare après le passage du convoi de fret le plus long du monde.
Pour aller plus loin
- 6 faits vraiment surprenants sur Shawinigan (à noter que d'après mes recherches, le parc Saint-Maurice n'a pas été dessiné par la même boite que Central Park)
- Shawinigan : Une ville née de l’industrie (ce que semble confirmer cet article de 1986)
- Shawinigan Water and Power Company
- Les Chutes de Shawinigan en photos et vidéos : un magnifique spectacle annuel (ce qu'on a raté)
Infos pratiques
En théorie, en peut rejoindre Shawinigan depuis Montréal en train en 2h30, pour environ 27$. En pratique, il vaut mieux ne pas avoir un planning trop serré. Privilégier donc la voiture si possible (il semble que le covoiturage marche plutôt bien également).
Le vendredi, on a déjeuné au Radoteux. Peu cher, bon, et dispose d'une terrasse.
Le Marché Public se trouve un peu à l'écart de tout, dans le nord de la ville.
L'Uni-Vert des Artisans est une sympathique petite boutique d'artisanat local. Spoiler : c'est un peu cher.
Le Trou du Diable est probablement un incontournable, surtout si vous aimez la bière (ils couvrent à peu près toute la typologie). La nourriture y est aussi excellente.
Elle n'ouvrait que la semaine suivante, mais la Cité de l'énergie est une curiosité locale qui peut valoir le coup d'œil.
Le Broadway Pub offre une bonne sélection de bières produites localement et fait aussi restaurant, leur carte proposant des plats américains/mexicains assez classiques dont nous n'avons testé que les nachos, mais le reste avait appétissant sur les tables voisines.
On a diné au Bistro Pub Le Chenapan. Bon, service agréable (comme partout ceci dit). Peut-être un poil plus cher que la moyenne locale.
Le dimanche, nous avons brunché au Bianky, qui ne paye pas de mine mais qui s'avère être un diner à l'américaine pas cher, bon et avec des assiettes bien fournies, avec le café illimité en bonus.
Globalement, la restauration comme l'hébergement sont vraiment bon marché.