Mulatu Astatke au Royal Festival Hall (13/09/2014)
14/09/2014J'ai commencé à m'intéresser au jazz il y a peu. Je n'y connais toujours rien, mais j'y trouve désormais un certain plaisir à l'écoute, là où j'étais indifférent voire parfois agacé par une trop forte présence de cuivres (en revanche, le ska, cherchez pas, c'est mort).
Sans pouvoir dire à quel moment ça a réellement basculé, je m'en suis rendu compte en me surprenant à apprécier la performance de Melanie de Biasio en première partie de Agnes Obel au Barbican Centre en avril dernier.
Mulatu Astatke est connu comme étant "le père de l'Ethio-jazz", un courant musical mélangeant allègrement musique traditionnelle éthiopienne, jazz, funk et soul.
Mon premier contact avec sa musique s'est fait via l'OST de Broken Flowers ; j'avais trouvé ça sympa, sans vraiment approfondir. Son nom est réapparu à plusieurs occasions au cours des années qui ont suivi et, avec mon récent intérêt pour le jazz, lorsque j'ai appris qu'il était programmé au Southbank Centre et qu'il restait des places, j'ai dit twingo.
Le Royal Festival Hall (qui fait donc partie du plus grand ensemble qu'est le Southbank Centre, comme vous l'aurez peut-être compris) est une grande et belle salle bordée de balcons, pouvant accueillir jusqu'à 2500 personnes. On peut entre autres y voir des opéras, des spectacles de danse ou assister à des talks.
Je m'y pointe en avance : la dernière fois que je me suis rendu à cette venue, je suis arrivé avec 10 minutes de retard et j'ai dû attendre 15 minutes de plus pour qu'on me place pendant un break (a priori on rigole pas trop avec les opéras - même si celui-ci était comique) (au passage, c'était cool mais pas transcendant, je dois pas encore être tout à fait prêt pour ça). Je suis placé au second rang, pas super loin du centre, ce qui en gros est une place pas trop dégueu. Le hall se remplit progressivement, et le siège à ma gauche se retrouve occupé par une femme que je devine tout de suite sympathique. On échange quelques mondanités et la maîtresse de cérémonie monte sur scène pour annoncer le programme.
La première partie est un ensemble musique et danse ; je n'arriverai jamais à bien comprendre le nom et le site du Southbank Centre est plutôt avare en informations, du coup impossible de dire de qui il s'agissait. On échange des regards tour à tour un brin perplexes et amusés avec ma voisine, mais globalement c'est plutôt plaisant, et le job de chauffage de salle est fait. Mulatu Astatke et un de ses musiciens les accompagnent sur deux morceaux.
Place ensuite au "Docteur" (Astatke a reçu le titre honorifique de Docteur en musique par le Berklee College of Music de Boston) et à son groupe Step Ahead (saxophone, trompette, piano, percussions, batterie et contrebasse : bref, y'a du monde sur scène).
À partir de là, la magie s'opère.
À un timide battement du pied s'ajoutent progressivement un balancement de la tête, un tapage de mains en cadence puis des sifflets de joie, le tout accompagné de ce sourire indécrochable un peu inexplicable. Je n'ai jamais compris ces gens qui s'extasient en voyant un mec s'exciter sur sa contrebasse de manière un peu désordonnée, et c'est pourtant bien ce que je suis en train de faire. Je ne pensais pas non plus qu'un solo de saxo pouvait être aussi réjouissant (enfin, si, mais vous m'avez compris). Chaque musicien a son moment de mise en lumière, et chaque solo se solde par la fervente expression du public. Je gueule aussi, même si je ne sais pas trop pourquoi ; je ne suis clairement pas à même de juger un tant soit peu la technique.
Mais il se passe définitivement un truc : je suis dedans.
Je ne connais pas assez l'oeuvre du musicien pour décrire précisement la set list ; je sais juste qu'il y a eu des reprises, des guests (dont deux rappeurs, l'un identifié comme étant Adian Coker, ajoutant encore un autre ingrédient à cette savoureuse cuisine des styles), et que les deux extraits de la BO de Broken Flowers ont été joués ("Yègellé Tezeta" et "Yèkèrmo Sèw"). Certains morceaux étaient calmes, d'autres très entrainants, et le tout bien équilibré.
In fine, je suis ravi d'avoir Mulatu Astatke en live, surtout dans d'aussi bonnes conditions. Je n'ai fait qu'égratigner la surface de la scène jazz, et nul doute qu'il y a beaucoup à explorer. La richesse de la musique du Docteur en est probablement un bon apercu.
Note : La photo est pourrie car volée à la fin du concert : lors de la première partie, j'ai pris une photo d'un des danseurs qui ressemblait fortement à Kamini, et un mec de la sécurité a surgi de nulle part pour me demander de bien vouloir remettre mon téléphone dans ma poche.